« J'ai traversé les tempêtes de sable du désert.
Offrant à la Terre nouveau repos et nouvelle ère.
J'ai plongé dans les abimes les plus noirs.
Offrant à ce monde ce dont il a besoin, l'espoir.
Nous serrons d'un commun accord de dire que ces paroles n'ont aucun sens propre.
Mais là où nous nous différencions, c'est que moi, j'y vois tout mon amour-propre.
Et je m'essouffle, je titube et je flanche. Je penche du côté ténébreux de l'être sans chair. Je vois les créatures, avec leur fière allure. Elles m'appellent, elles me hissent vers elles. Elle hurlent, elles scandent mon nom. Y résister est une prouesse que seule une sage personne est capable de réaliser. Mais suis-je une sage personne ? Je suis ce qu'on appelle une perfection de beauté. Si bien que même la déesse Aphrodite elle-même rougit devant ma peau porcelaine. [...] »

Le papier est froissé, et commence un peu décolorer. C'est la première fois que tu relis un des textes que tu as écris il y a de cela des années. Tu étais encore au secondaire quand tu as écris ceci. C'est certes très bien écrit pour une gamine de 13 ou 14 ans, mais le C- qui t'a été accordé est justifié par le manque de sens. Car en effet, il ne sert à rien de caser de belles phrases par-ci, par-là si le sens ne suit pas. Toc toc. On frappe à la porte. « La porte est déverrouillée. » tu dis sans demander de qui il s'agit. C'est ton père qui entre. Ton père, ce fastidieux ex-réalisateur qui t'as offert tout l'amour dont il disposait. Petite fille gâtée mais pas pourrie, tu le remercie chaque jour pour ça car tu sais que c'est important. « Je viens d'apprendre pour Ed. » te dit-il. Ed. Le nom résonne dans les connexions de ton cerveau. « Oui. Eh bien... Ce n'était juste pas quelqu'un d'approprié. ». Ed, ce cher, cher Ed. Celui qui fut ton voisin, puis ton ami, ton meilleur ami, ton petit-ami et enfin celui qui te trompa avec la première fille facile qui passait par là. Étrangement, cela t'enleva un poids, un gros poids. Depuis des mois déjà tu voulais le quitter mais tu cherchais encore comment faire. Tout le monde maintenant semble penser que tu as le coeur brisé, alors que tu te sens bien. Très bien même.
Depuis toute petite déjà tu ne pleurais pas beaucoup. En fait, tu ne pleurais jamais sauf quand tu te faisais mal. Et là on pouvait dire que ça y allait fort, car le moindre petit bobo te fait encore aujourd'hui agoniser. Tu n'as même pas pleuré quand tu as du quitter Bristol et tous tes amis pour aller vivre à Paris suite à la mutation de ta mère.